Egypte : organes à vendre
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Egypte : organes à vendre
Le prélèvement d'organes sur les cadavres est interdit en Egypte. Résultat : les organes sont prélevés sur des donneurs vivants, et dans la majorité des cas, moyennant rétribution. Un projet de loi visant à criminaliser ce commerce et à autoriser le prélèvement sur cadavres doit être examiné prochainement. A plusieurs reprises déjà, des tentatives de régulation ont échoué, en raison notamment d'objections religieuses sur la définition de la mort. Alors que ce débat va être relancé en Egypte, enquête sur le « marché noir » des organes.
« Jeune homme, 26 ans. Prêt à vendre un de mes reins. Très sérieux. NB : je ne connais pas mon groupe sanguin ». « Vends lobe de foie. Groupe sanguin O+ ». « Urgent : cherche rein pour femme malade. Groupe sanguin A ou B. Compensation financière ». Perdues entre ventes d'appartements avec vue imprenable sur la Méditerranée et offres d'emploi en Arabie Saoudite, ce type de petite annonce figure en nombre sur l'Internet égyptien.
Mustafa a publié la sienne en juin 2007. Ce consultant cairote d'une cinquantaine d'années cherchait un rein pour sa belle-soeur. Le médecin avait prévenu : ils avaient un an, deux au plus, pour procéder à une greffe. Mais comment trouver un organe ? En Egypte, aucun système centralisé ne régit les transplantations, et le prélèvement sur cadavres est interdit. Des mois durant, Mustafa a donc parcouru les petites annonces et écumé les laboratoires d'analyses qui fournissent des listes de donneurs potentiels. « J'ai finalement trouvé, via un laboratoire qui m'a mis en contact avec une famille de paysans, des gens très pauvres. La femme était compatible. Elle voulait vendre son rein 25 000 livres égyptiennes [3100 euros]. J'ai décidé de lui en donner 45 000 », raconte-t-il.
Ce scénario est celui de la majorité des transplantations en Egypte. Une fois achevée cette quête clandestine et coûteuse, la plupart des opérations n'ont pourtant pas lieu dans le secret : elles sont effectuées par des chirurgiens dans des hôpitaux connus. Une situation paradoxale. « En l'état actuel de la législation, aucun texte spécifique ne criminalise la vente d'organes per se et il n'y a pas de loi autorisant le prélèvement sur cadavres. Les malades n'ont pas d'autre option que d'acheter un rein ou un lobe de foie, s'ils ne trouvent pas de donneurs dans leur entourage, déplore Soha Abdelaty, qui suit les questions de santé au sein de l'Egyptian Initiative for Personal Rights, l'une des principales organisations indépendantes de défense des droits humains du Caire. Il est impossible de donner des statistiques précises, mais l'Egypte est régulièrement citée parmi les pays les plus concernés au monde par le commerce d'organes », po ursuit-elle.
Avec près de 40 % de la population qui vit avec moins de deux dollars par jour, le pays offre un terrain fertile. Tous les ingrédients du trafic sont là : « Les technologies de transplantation sont disponibles, les patients n'ont pas d'alternative, et il y a une importante classe pauvre qui peut être exploitée pour ses organes », observe Debra Budiani, anthropologue américaine et fondatrice de COFS, Coalition for Organ-Failure Solutions, une jeune ONG qui travaille sur le terrain auprès de ceux qui ont vendu leurs organes (...)
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